Après avoir gagné la majorité des titres majeurs sur la scène internationale l’an passé – Moto GP, Superbike, Supersport ou encore MX2… –, Yamaha va tenter de conserver cette suprématie en 2022. Politique sportive, Prototype MotoGP, règlement Supersport, filière Moto2 : le président de Yamaha Motor Europe, Eric de Seynes, nous confie avec franchise ses opinions, espoirs, doutes et ambitions.
GP-Inside: Après une saison sportive 2021 exceptionnelle pour Yamaha, comment se présente 2022 ?
Eric de Seynes : « Effectivement, 2021 a été une formidable satisfaction, d’abord bien sûr grâce à la victoire de Fabio Quartararo en Moto GP, où le niveau est tellement relevé. C’est l’addition d’émotions rares et précieuses qui sont le fruit du talent, du travail et de l’unité autour du pilote. Il faut savourer ces moments et c’est ce que nous faisons. Ensuite, les autres titres m’ont apporté beaucoup de joie car ils sont la conséquence d’une politique de fond que nous avons mise en place depuis quelques années, qui a pu paraître un peu laborieuse dans un premier temps, mais qui prouve avec ces résultats que c’était la bonne méthode. Le principe a consisté à donner à des équipes privées les moyens techniques, humains et financiers de viser la victoire, tout en mettant en place une pyramide de pilotes que nous suivons, de la base jusqu’au plus haut niveau. »
« Le titre MX2 de Maxime Renaux illustre parfaitement mes propos puisqu’on a commencé avec lui il y a plus de dix ans, en 85 cm3. Il a été champion du monde Junior en 2015, puis s’est blessé et a tenu à passer son bac, obtenu avec mention. Dans cette période, nous lui avons laissé le temps de se reconstruire et d’atteindre ses objectifs avant d’intégrer le team Factory et d’aller chercher le titre MX2. Il est fondamental d’établir des relations de confiance dans la durée avec nos pilotes. Au-delà du titre et des victoires, c’est ce lien humain qui traduit les valeurs de Yamaha, comme les miennes d’ailleurs »
« Une autre illustration est Toprak (Razgatlioglu). On avait bien sûr repéré sa vitesse et son talent, mais depuis qu’il est chez nous, nous l’avons vu se transformer, s’épanouir humainement. Quand au bout de quatre mois de collaboration, il me dit : ‘Eric, j’ai trouvé ma famille, je n’ai jamais connu cette ambiance avant’, ça vaut de l’or et tu as envie de tout lui donner pour qu’il gagne. Ces valeurs sont essentielles à mes yeux et justifient qu’on investisse autant sur la compétition, qui reste un acte de communauté fort entre un public, des clients et une marque. Le titre permet de rester dans les tablettes, mais l’aventure humaine pour l’obtenir est ce qui compte le plus. Mon unique déception est d’avoir manqué à chaque fois la course où nos pilotes ont remporté le titre. Je me suis complètement raté sur mes simulations ! (rires) »
En Moto GP, comment résoudre le problème de vitesse de pointe et de puissance dont se plaignent Fabio Quartararo et les autres pilotes Yamaha ?
EdS :
« Je pense qu’on a tort de ne se focaliser que sur la vitesse de pointe. Bien sûr, c’est un paramètre qui parle à tout le monde, mais ça représente quelle proportion sur un tour chrono ? Nous savons tous que la vitesse de passage en courbe est bien plus importante, il y a bien plus de virages que de lignes droites sur un circuit ! Je regrette que la vertu cardinale d’une moto puisse se résumer à sa vitesse de pointe alors que ce qui compte, c’est le temps au tour, tout comme la confiance qu’elle donne à son pilote pour oser attaquer et battre ses adversaires en course. Quand tu es champion du monde, cela veut dire que le pilote est au top, mais aussi que la moto est bonne. »
« Par ailleurs, la vitesse de pointe est liée à plusieurs paramètres, et pas uniquement à la puissance du moteur. C’est une combinaison qui associe moteur, châssis, pneumatiques et électronique. C’est cette équation qui définit la rapidité avec laquelle tu sors du dernier virage, et qui détermine la vitesse que tu pourras atteindre en bout de ligne droite. »
« Quand on est passé au boîtier électronique unique Magneti Marelli, on avait tous un temps de retard par rapport à Ducati, qui utilisait ce boitier depuis très longtemps, avec des ingénieurs qui savaient parfaitement l’exploiter. C’est entre autres pour cette raison que certains de nos adversaires avaient souvent la meilleure motricité et vitesse de pointe. Avec cet acquis, ils pouvaient travailler sur d’autres évolutions – aérodynamiques notamment – pendant qu’on passait notre temps à comprendre ce boîtier et à l’optimiser pour nos motos. Quand tu sais qu’au virage du raccordement du Mans, on retire plus de la moitié de la puissance du moteur pour avoir une bonne traction, c’est bien que le problème ne vient pas strictement de la puissance, mais de la façon dont tu peux la faire passer. »
« Alors, même si ça ne se voit pas, on travaille beaucoup pour trouver des solutions, car on connait nos points forts comme nos points faibles. Même si nous n’avons pas encore le nouveau moteur qui pourrait nous apporter un gain très significatif en puissance pure, nous avons travaillé sur de nombreuses améliorations pour cette saison, comme la traction de la moto, l’optimisation du châssis, l’équilibre et l’aérodynamisme. »
« Je comprends parfaitement les réactions de Fabio qui est dans son rôle quand il demande plus de puissance, car c’est aujourd’hui notre point faible. Mais il sait aussi que nous tenons profondément à lui et que nous faisons le maximum pour faire progresser la M1, pour le soutenir dans tous les compartiments techniques du jeu et l’emmener vers un nouveau titre. »
Es-tu inquiet ou confiant pour les futurs résultats de Yamaha en Moto GP ?
EdS : « Je tiens à préciser que le Moto GP ne fait pas partie de mes responsabilités, car ce programme est directement géré par YMR et le Japon. C’est donc en tant que passionné averti que je te réponds. Pour cette saison, Fabio sera dans le coup pour le titre, et je vois aussi Franco Morbidelli revenir dans le bon paquet. Pour l’avenir, je pense que le nouveau partenariat entre Yamaha et le team Moto2 de Valentino Rossi – le Yamaha VR46 Master Camp Team – va servir à préparer l’avenir en faisant grandir des pilotes en amont de la catégorie Moto GP. Il était important de mettre en place une sorte de filière, comme nous l’avons fait en Supersport et Superbike, pour préparer le futur. C’est de cette manière qu’on a réussi à attirer de jeunes pilotes talentueux, car ils savent que s’ils gagnent avec nous, ils pourront monter dans la catégorie supérieure. »
Quel est ton pronostic pour 2022 ?
EdS : « Je ne vois pour l’instant pas éclore de nouveaux talents évidents, donc on devrait retrouver les mêmes qu’en 2021, avec Quartararo et Bagnaia en favoris. Les Suzuki ont l’air dans le coup, et il faut surveiller Espargaro et Viñales car les Aprilia ont beaucoup progressé. Attention aussi à Johann Zarco, qui sait ce qu’il faut faire pour être champion du monde et qui est très rapide. La seule inconnue, en fait, c’est Honda et le niveau de performance de Marquez sur l’intégralité du championnat. C’est en tout cas très excitant car les écarts sont infimes, et cette incertitude contribue à l’intérêt de la catégorie. Tous les fans d’automobile le reconnaissent ! En Moto GP, on s’approche désormais du professionnalisme de la F1, mais avec une simplicité et une forme de convivialité propres à la moto, où le pilote reste le héros. Nous sommes donc dans un équilibre presque parfait. »
Un mot sur le nouveau règlement du championnat du monde Supersport, qui ouvre la porte à de nouveaux constructeurs en acceptant des cylindrées et des architectures nouvelles ?
EdS : « Sans vouloir polémiquer, j’ai du mal à trouver l’équation qui pourrait assurer une réelle équité sportive à ce nouveau règlement. J’ai exprimé mes doutes à la Dorna et la FIM, et ils n’en ont pas tenu compte. Malheureusement je continue à penser que ces mesures ne sont pas bonnes pour l’avenir sportif de la catégorie, au moins à court terme. Maintenant, le temps de la discussion est terminé et il va falloir voir comment se passe la saison. Ma conviction demeure qu’il faudra amender certains articles de ce règlement. »
« Je te donne un exemple concret : on dit que les valeurs de couple seront harmonisées par la gestion des régimes moteur, or notre moto a un couple maximum de 68 N/m (NDR : Newton par mètre). alors que certains concurrents ont un couple minimum de 72 N/m. Donc quoi que tu fasses, ils auront toujours plus de couple que nous ! Et notre seule possibilité de lutter contre ce handicap, c’était de garder notre avantage de poids. Mais ce règlement impose désormais d’avoir le même poids minimum, pour tous ! »
« Je trouve tout de même que ce nouveau règlement manque de préparation. Nous sommes mi-février, le championnat commence dans deux mois et nous attendons toujours le règlement définitif. Quoi qu’on fasse, ce sera difficile d’expliquer aux fans qu’un twin 955 cm3 ne court pas avec les 1000 cm3, mais contre des quatre cylindres 598cc, quand on a expliqué depuis des années que la bonne équivalecte était de 599cc pour un 4 cylindres, 675cc pour un 3 cylindres et 750cc pour un twin. »
Propos recueillis par Laurent Corric
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MDR la big boss Europe ne se soucis même des propos de son meilleur pilote, certe la vitesse de pointe ne fait pas tout mais quand tu es derrière une ou des motos t’aimerai les dépasser en ligne droite car en virage c’est rare de voir de dépassement mais quand je dis en virage c’est en virage pas en entrée sur les freins !
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