Pilote officiel Yamaha en GP 500 au milieu des années 90, Bernard Garcia a côtoyé l’élite de la moto mondiale pendant quelques saisons. Depuis, avec son frère Marc, il a développé l’école de pilotage sur circuit « 4G », pour transmettre son expérience et sa passion à ses clients.
GP Inside : Quels souvenirs gardes-tu de tes saisons en GP ?
Bernard Garcia : « Que du bon… malgré toutes les galères ! Désormais, le temps a fait son œuvre et je ne garde que le meilleur en pensant à la chance qu’on a eue, avec mon frère Marc, de rouler au plus haut niveau international, sur les plus beaux circuits du monde contre des Doohan, Schwantz ou Cadalora, c’est un privilège dont je suis fier. Quand je regarde un Grand Prix aujourd’hui, je me dis qu’il y a presque trente ans, c’était moi sur la grille de départ ! Bien sûr, je n’ai pas été champion du monde, mais pour un jeune marseillais avec peu de moyens, qui a gravi les échelons en partant du pocket-bike et qui se retrouve à 22 ans sur une Yamaha officielle en 500cc aux côtés de Freddie Spencer, je n’ai pas à rougir de ma carrière ! Et si c’était à refaire, je referais exactement la même chose parce que j’ai vécu tellement de moments extraordinaires, avec une intensité et des émotions que seul le sport de haut-niveau peut procurer. »
« J’ai toujours essayé de donner le meilleur de moi-même et, à ce titre, mon dernier GP est révélateur. C’était en 98, je galérais et j’étais aller consulter une voyante, même si je n’y croyais pas trop. Ça montre à quel point j’étais perdu ! Et là, elle me dit que j’allais gagner un GP 500cc dans quinze jours ! Évidemment je ne l’ai pas crue puisqu’à ce moment je n’avais même pas de guidon. Trois jours plus tard, on m’appelle pour me proposer de disputer le GP d’Imola en remplacement de Cadalora qui s’était blessé ! Je te jure que je me suis vu sur la plus haute marche du podium ! J’étais tellement motivé que j’ai fait un départ canon du fond de la grille puisque la moto était tombée en panne pendant les qualifs. J’ai fait trois tours avec le groupe de tête en pensant que j’allais gagner, normal puisque la voyante me l’avait dit… Et je me suis finalement envolé dans les grillages ! C’était mon dernier GP et il était temps que ça s’arrête. »
Et l’après-carrière alors ?
B.G : « Dur, vraiment dur. Quand tu ne fais que du sport et de la moto pendant vingt ans, tu ne sais rien faire d’autre et tu découvres alors la réalité de la vie. Je n’avais plus un sou et j’ai donc enchaîné les petits boulots pour m’en sortir. Peintre, maçon, taxi, je prenais tout ce que je trouvais et ça m’a bien remis les pieds sur terre. Quand tu te lèves aux aurores tous les matins alors que tu es crevé des journées précédentes, ça t’apprend forcément à rester humble ! »
« Sincèrement, j’ai beaucoup appris pendant cette période car en fait, on vit dans une bulle quand on est pilote, déconnecté de la réalité et des tracas du quotidien. La seule préoccupation d’un pilote, c’est d’être performant, pas de savoir comment il va manger. Et puis, en 2006, je suis revenu dans le milieu de la moto avec mon frère Marc pour développer l’école de pilotage 4G avec l’idée que pour enseigner le pilotage, nous étions assez crédibles. Ainsi, depuis seize ans, je passe une bonne partie de mes journées sur les circuits du sud de la France et nous amenons également nos clients en Espagne et en Italie. C’est franchement gratifiant de transmettre notre savoir et notre expérience, mais aussi de tisser des liens forts avec les motards. »
Que viennent apprendre tes clients ?
B.G : « Il y a deux catégories de motards qui viennent sur circuit : ceux qui savent rouler vite et qui veulent aller encore plus vite, et ceux qui veulent apprendre à maîtriser leur moto. Le circuit est la meilleure école de la route. Quand tu maîtrises le pilotage sur circuit, tu es beaucoup plus en sécurité sur la route. Tu sais freiner fort, accélérer au bon moment, rattraper une glisse, alors que si ça t’arrive dans la circulation, ça peut faire très mal. Je pense que tous les motards devraient venir au moins une journée sur un circuit, ça devrait même être obligatoire ! »
« Aujourd’hui, tout le monde peut acheter une moto de série plus puissante que nos 500cc de l’époque et partir sur la route avec zéro expérience, c’est quand même très dangereux. Nous, on leur apprend au moins les bases: chauffer les pneus, avoir la bonne position et savoir où poser le regard en virage. Rien qu’avec ces quelques notions, tu appréhendes mieux les dangers de la route. J’espère que nous parviendrons un jour à faire un partenariat avec une moto-école pour inciter ceux qui passent le permis à venir faire une journée sur circuit. »
« Et pour ceux qui veulent apprendre à rouler vite, nous faisons des coaching personnalisés qui leur permettent de progresser et de gagner des poignées de secondes et là, notre expérience nous sert encore. Pas besoin d’avoir des lignes d’échappement ou des boîtiers électroniques hors de prix, les motos actuelles sont déjà suffisamment performantes pour aller très vite quand on sait s’en servir ! »
Que penses-tu de la saison de Moto GP ?
B.G : « Quel régal, quel bonheur de voir deux français se battre pour la victoire, on en a tellement rêvé mon frère et moi ! Je suis d’autant plus sensible aux parcours de Fabio et Johann que, comme nous, ils sont issus d’un milieu modeste et ils ont construit leur carrière à force de travail et de détermination, c’est admirable. Pour moi, Fabio est plus fort que Marquez, Rossi et tous les meilleurs pilotes de l’histoire. Il suffit de voir où sont les autres Yamaha en course, elles sont tellement loin qu’on ne les voit jamais à la télé ! Fabio fait en plus preuve d’une grande maturité malgré son jeune âge, il a compris que ce n’était pas la peine de se plaindre de sa moto mais qu’il valait mieux en tirer le meilleur, c’est une attitude de grand champion. Je suis persuadé qu’il sera encore champion du monde cette année et que ce n’est que le début d’une longue série ! »
Bonjour et merci Bernard !
Oui, merci pour tes bons conseils, l’organisation de sessions de roulages sur de beaux circuits et merci aussi pour ta bonne humeur.
C’est vrai qu’on gagne en confiance sur la route quand on a fait du circuit. On reste humble mais on est plus agile.
À une prochaine fois peut-être sur un circuit du sud.
Basgi.
Marianne de Corse.
Indubitablement! ce vélo est génial pour les courses de rallye!